Le sermon de ‘Arafat


Le sermon de ‘Arafat

Parmi les sermons du Prophète (prière et salut sur lui) recensés au cours du Pèlerinage,  nous pouvons compter celui de ‘Arafat. Le noble compagnon Jabir ibn ‘Abd Allah (Le Très Haut) nous relate dans un long récit les détails du Pèlerinage du Prophète (prière et salut sur lui) depuis son départ de Médine jusqu’à son retour.

Ce sublime Hadith comprend un certain nombre de leçons et de perles rares notamment des règles parmi les règles primordiales. Celui-ci est recensé dans le Sahîh de l’Imam Muslim[1] -Dieu lui fasse miséricorde-. Notre témoin oculaire nous raconte (prière et salut sur lui) au fil de ce Hadith :

« Lorsque le soleil se coucha, il sollicita sa chamelle « al Qaswâ » qui fut sellée pour le départ. Il se rendit au cœur du Wadi (vallée) où il prononça  un sermon. 

Il y déclara entre autres : Votre sang et vos biens sont sacrés, comme ce jour-ci est sacré, en ce mois-ci, et sur votre terre. Sachez que toute chose de l’ère païenne est révolue et je la mets sous mes pieds. Le sang versé durant la « Jâhiliya » (temps de l’ignorance ou avant l’arrivée de l’islam) est révolu. Le premier sang versé révolu, est le sang d’ibn Rabi’a ibn al Harîth. Il a été adopté par la tribu Banu Sa’ad, et les membres de la tribu de Hudhayl l’ont tué. L’usure de l’ère païenne est révolue. La première usure révolue, est la nôtre, celle de ‘Abbâs ibn ‘Abd al Mouttalib ; celle-ci est entièrement révolue. Craignez Allah envers les femmes, vous les avez prises par le pacte d’Allah. Vous avez obtenu la permission d’avoir des rapports  avec elles par la Parole d’Allah. Elles vous doivent de ne faire entrer chez vous aucune personne que vous détestez. Si elles venaient à le faire, vous pouvez les corriger sans les maltraiter. Par contre, vous leur devez de les entretenir et de les vêtir convenablement.

 

Je vous ai laissé de quoi, si vous vous y accrochez, ne jamais vous égarer après moi : le Livre d’Allah. Sachez que vous serez interrogés à mon sujet, alors qu’allez-vous répondre ? Nous attestons - ont-ils répondu - que tu as transmis (le message), rempli (ta mission) et averti (les hommes).  C’est alors qu’il a levé son doigt en direction du ciel pour le pointer ensuite sur la foule, tout en s’exclamant : Ô Allah ! Sois Témoin ! Ô Allah ! Sois Témoin ! A trois reprises.

On fit l’appel à la prière ensuite et le petit appel pour prier le Dhohr. On refit l’Iqama après pour prier le ‘Asr. »

 

Ce sermon magnifique comprend de sublimes principes, d’illustres fondements, et de nobles règles de bienséance. L’Erudit ibn Al Qayyîm – Dieu lui fasse miséricorde – a notifié pour décrire ce sermon et expliquer son contenu :

« Il a prononcé publiquement de sa monture un remarquable sermon où il a établi les principes de l’Islam, tout en détruisant les principes du paganisme et de l’associationnisme. Il y a établi également l’interdiction de commettre les interdits que les peuples - toute confession confondue - s’accordent à interdire (ou à rendre sacrés). Autrement dit, le sang, les biens, et l’honneur. Il a foulé les habitudes de l’ère païenne sous ses pieds, il a abrogé l’usure en entier et l’a annulée.

Il a recommandé aux hommes de bien traiter les femmes en signalant le droit qu’elles avaient sur eux et leur devoir. Il incombe de subvenir à leurs besoins et de les vêtir dans les limites du convenable sans pour autant fixer de limite particulière. Il a autorisé aux maris de corriger leurs femmes dans le cas où elles feraient entrer chez eux des personnes dont la présence lui serait hostile. Il a recommandé à la communauté, en général, de s’accrocher au Livre d’Allah en faisant savoir à ses membres qu’ils ne pourraient s’égarer aussi longtemps qu’ils s’y accrocheraient. Il a ensuite informé qu’ils seront interrogés à son sujet, et leur a demandé de s’exprimer sur ce qu’ils allaient répondre, et sur quoi ils allaient témoigner. Ils ont répondu : « Nous témoignons que tu as transmis (le message), rempli (ta mission) et averti (les hommes) ». Il a alors levé son doigt au ciel pour rendre compte à Allah de leur témoignage à trois reprises. Il a même enjoint aux personnes présentes de transmettre ces enseignements aux personnes absentes. » [2] Fin de citation.

Ce sermon embrasse un ensemble important de points de la religion et ses mœurs. Les voici dans l’ordre d’énumération du Hadith :

Premièrement : il a interdit de s’en prendre impunément au sang des musulmans et à leurs biens. Il a confirmé ce point en ayant recours à une tournure éloquente. « Vous savez, votre sang et vos biens sont sacrés comme ce jour-ci est  sacré, au cours de ce mois-ci, sur votre terre. » Chacun est bien conscient du caractère sacré de la Terre Sacrée d’Allah. Ils savent pertinemment qu’elle est d’autant plus sacrée, le jour sacré (de ‘Arafat) au cours du mois sacré (de Dhul Hijja). Les biens et la vie du musulman sont aussi précieusement sacrés que le jour en question, au cours du mois en question, et sur la terre d’Allah. Son caractère sacré est donc incontestable.

 

Deuxièmement : il a totalement abrogé les pratiques païennes et les a toutes annulées. « Sachez que toute chose de l’ère païenne, je la mets sous mes pieds et elle est révolue. Le sang de la « Jâhiliya » est abrogé. Le premier sang par lequel je commence, est le sang d’ibn Rabi’a ibn al Harîth. Il a été adopté par la tribu Banu Sa’ad, et Hudhayl l’ont tué. L’usure (de l’ère païenne) est entièrement révolue. La première usure par laquelle je commence, est la nôtre, celle de ‘Abbâs ibn ‘Abd al Mouttalib ; celle-ci est entièrement abrogée. »

Dans ce paragraphe, il a annulé les pratiques de la « Jâhiliya » et ses transactions commerciales usuraires non achevées. Il a aussi indiqué que la loi du Talion ne sera pas appliquée pour le sang versé à cette époque. A travers ses dires : « Je la mets sous mes pieds, révolue », il sous-entend son annulation. Lorsqu’il déclare au sujet de l’usure : « L’usure (de l’ère païenne) est entièrement abrogée. » Il veut dire qu’elle est refusée et annulée.

Troisièmement : il a recommandé de bien traiter les femmes et a encouragé à avoir de bonnes relations avec elles. « Craignez Allah envers les femmes, vous les avez prises par le pacte d’Allah. Vous avez obtenu la permission d’avoir des rapports avec elles par la Parole d’Allah. Elles vous doivent de ne faire entrer chez vous aucune personne que vous détestez. Si elles venaient à le faire, vous pouvez les frapper sans les molester. Par contre, vous  devez  les entretenir et les vêtir convenablement. » Ce paragraphe invite à considérer le droit de la femme. A travers cette recommandation, il incite à cohabiter convenablement avec elle.

Bon nombre de propos prophétiques abondent dans ce sens ; L’accent y est mis sur la recommandation envers les  femmes et la mise en valeur de leurs droits, tout en mettant en garde contre la négligence à leur égard.

Quatrièmement : recommander le Livre d’Allah (U). Le faux ne l'atteint d'aucune part, ni par devant, ni par derrière, c’est une révélation émanant d’un Dieu Sage et Digne de Louange. « Je vous ai laissé de quoi, si vous vous y accrochez, ne jamais vous égarer  après moi : le Livre d’Allah. » Le Coran est un guide, Allah en a fait un guide pour les hommes afin d’éclairer leur droit chemin et toute initiative bénéfique. Ils peuvent distinguer à travers lui le vrai du faux, la bonne voie de l’égarement, et le bien du mal. Quiconque s’attache à lui est bien guidé, quiconque se tient à ses enseignements ne peut être égaré, et quiconque le suit ne peut être malheureux. S’il s’est contenté de citer le Livre, c’est parce qu’il implique de mettre la Tradition en pratique.

Quiconque néglige la Sunna ne fait que négliger le Coran. Dans ses paroles également : « Sachez que vous serez interrogés à mon sujet », allusion est faite à la mise en pratique de la Tradition.

Cinquièmement : Il les a informés qu’ils seront interrogés à son sujet (r). Il leur a demandé de formuler quelle sera leur réponse : « Sachez que vous serez interrogés à mon sujet, alors qu’allez-vous répondre ? » « Nous attestons – ont-ils répondu – que tu as transmis, rempli, et averti. » Alors, il a levé son doigt en direction du ciel pour le pointer ensuite sur la foule, tout en s’exclamant : « Ô Allah ! Sois-en Témoin ! Ô Allah ! Sois-en Témoin ! » A trois reprises.

« Vous serez interrogés à mon sujet » signifie : Concernant ma transmission du message.

« Alors qu’allez-vous répondre ? » signifie : à mon sujet. « Tu as transmis » c’est-à-dire : le message. « Rempli » c’est-à-dire : ta mission. « Et averti » c’est-à-dire : ta communauté. « Ô Allah ! Sois Témoin ! » C’est-à-dire : à l’encontre de Tes serviteurs ayant reconnu que j’ai bien rempli ma mission, Tu suffis certes comme Témoin.

Extrait du livre : Prêches et sermons extraits du Pèlerinage de l’Adieu du Sheïkh ‘Abd e-Razzaq el Badr.

Traduit et adapté pour islamhouse par :

Karim ZENTICI

Relu par Abu Hamza Al-Germâny  

  

 

 

 


[1] Voir (1218).

[2] Zad el Ma’ad (2/233).